Ben Harper

Ben Harper T.

Lorsque l’on entreprend d’écrire un papier sur Ben Harper, la question qui vient tout de suite à l’esprit est celle de savoir ce que l’on va bien pouvoir dire. Car depuis son apparition sur la scène musicale, il est le chouchou des medias qui l’ont tout de suite porté aux nues. Ben Harper semble porter une auréole, drapé dans un charisme et un engagement politique dont seuls pouvaient se targuer  Bob Marley, John Lennon ou Bob Dylan. Comme eux, sa musique se situe au confluent des genres,transcendant le temps et les barrières pour exprimer son être profond, qui lui-même trouve sa source dans le métissage des races.

Et c’est peut-être là que se trouve la singularité de Ben.

Né le 28 octobre 1969 dans la ville californienne de Clarmont ,(où sa mère Ellen Chase-Verdries tient toujours le Folk Music Center, magasin et musée d’instruments de musique fondé par ses grands-parents), Benjamin Chase Harper évolue tout petit dans un environnement où la musique est presque une religion. Il grandit au milieu des guitares, luths,mandolines,violons et des poupées vaudou accrochés au mur. Au total, plus d’un millier d’instruments et un savoir-faire dont la rareté et la richesse  ont conduit les autorités américaines à classer le Folk Music Center au patrimoine mondial par l’Unesco. « Je suis né ici, raconte Ben Harper. Mes grands-parents ont créé le magasin en 1958 ».

Sa grand-mère Dorothy, une Russe juive, était banjoïste et chanteuse. Sur une photo accrochée au mur, son grand-père Charles, vieil homme aux traits délicats et à la longue barbe blanche accompagne les visiteurs, un sourire bienveillant aux lèvres. « Un croisement entre Jesus et le père Noël, commente Ben moqueur à souhait. Engagé dans l’armée pendant la deuxième guerre mondiale,une bombe a explosé à côté de lui et l’a rendu sourd. Et à son retour, il est devenu . .  luthier. Il n’entendait rien mais ressentait toutes les vibrations. Il m’a appris ce métier et je l’ai exercé ici jusqu’à mes 18 ans. »

Enfant, Ben Harper passe ses nuits à écouter les bluesmen du Mississipi comme Robert Johnson et Son House, mais aussi de la musique africaine, indienne. . .   Il répète jusqu’à ce que ses doigts saignent et 16 ans,joue déjà dans les bars de Claremont au point de devenir une célébrité locale. Il faut dire que le contraire aurait été étonnant quand on a des professeurs comme Ry Cooder ou Taj Mahal, en pleine ascension à l’époque et qui trouvent refuge dans le magasin et deviennent des membres à part entière de la famille Harper . Une période heureuse toutefois entachée par l’alcoolisme du défunt père de Ben, Leonard, percussionniste-chanteur d’origine africaine et Cherokee. Je l’ai toujours vu boire, avoue son fils. Nos relations étaient difficiles. .  . Je lui ai dédié une chanson, Pleasure and Pain. Si l’alcool ne l’avait pas détruit, il aurait été un artiste beaucoup plus important que moi ».

En 1992, Ben enregistre son premier LP-vinyle (Pleasure and Pain), avec la complicité de son ami Tom Freund. Un coup d’essai qui se révèle un coup de maître :le label Virgin le signe illico et en 1994, le premier album du jeune prodige Welcome to the Cruel World émeut toute la planète musicale.

Son second opus, Fight for Mind paru en 1995 révèle toute la dimension politique qui anime Ben et qui trouvera un écho tout au long de sa carrière comme par exemple quand il apporte son soutien à la Birmane Ang San Suu Kyi à travers l’album For the lady.

En 1997, accompagné de son groupe The Innocent Criminals,il récidive avec un album qui fera l’effet d’une bombe sue la scène mondiale : The Will to live. C’est alors que le grand public se passionne pour ce phénomène au jeu et à la voix atypiques,aux influences multiples, dont la tournée mondiale est un véritable triomphe, avec à la clé des collaborations avec des références telles que Radiohead, Pearl Jam, R.E.M ou John Lee Hooker.

Après le magnifique Diamonds Inside (2003) et un détour par des influences plus funk et reggae, la rencontre de Ben et The Blind Boys of Alabama accouche en 2004 d’un album aux confins du gospel : There will be a light, une ode magnifique à la musique originelle des noirs d’Amérique. Outre le jeu à la slide bar, guitare posée sur les genoux cordes vers le haut pour un son novateur, le public découvre un Ben en bluesman nouvelle génération avec des racines bien ancrées dans cette mouvance, et se distinguant par une voix fort atypique. Un autre instrument à part entière qui explore sans réserve toute la musique noire  américaine en la mâtinant de folk pour donner une mixture délicieuse sur laquelle n’aurait pas craché le jeune Dylan. La collaboration entre Ben et les Innocent Criminals s’enrichira de deux abums Lifeline puis Both Side of the Gun.

Mais en fin 2008, Ben annonce sa séparation avec son groupe -fétiche et met sur pied Relentless 7,au style plus rock. Deux ans et un album plus tard, Ben met en veilleuse Relentless 7 pour former Fistful Of Mercy, une bande composée de Dhani Harrison, fils de George Harrison, Jessy Greene au violon et Jim Keltner percussions. Même si cette collaboration n’est pas considérée comme la meilleure de Ben, il n’en demeure pas moins qu’elle confirme aux fans que Ben demeurait curieux de tout (de tous aussi) et  n’entendait décidément pas se laisser enfermer dans un style convenu.

En octobre 2012, Ben choisit ses ballades préférées pour la sortie d’une rétrospective de By My Side,où l’on retrouve en plus des standards que sont Diamonds on The Inside Forever ou encore Wainting on an Angel,et deux inédits :Crazy Amazing et une version studio de Not Fire Not Ice.

En  mai 2014,Ben Harper va à nouveau dérouter ses fans lorsqu’il décide d’enregistrer un disque avec sa mère Ellen au chant. Conçu dans la pure tradition folk, sans électrification des instruments, Chilhood Home est un retour aux sources pour Ben : « ma musique c’est du folk », disait-il récemment à des journalistes . Mais pas que . .   . Les morceaux de Ben couvrent  toutes les variations de la musique d’aujourd’hui et d’hier,comme une invitation à construire un monde multiculturel et plus tolérant.  Zack Badji     

Illustration: Régine Coudol-Fougerouse    

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